La francophonie, portée par l’Organisation Internationale de la Francophonie défend une communauté de langue et de valeurs mais n’accorde encore que peu d’importance à sa dimension économique
L’homme français a perdu son aura dans le monde et ce, en l’espace de soixante ans. Rappelez-vous, en 1970 nous étions, la deuxième puissance économique du monde.
Or le français, donc ses représentants, avait à l’époque un caractère d’universalité et était porteur d’une perception exacte de la pensée rationnelle ou irrationnelle. Précision nuancée, raffinement de la composition et valorisation du savoir-vivre étaient les trois atouts principaux de notre langue. Pour synthétiser je citerai un écrivain, Jacques de Lacretelle, qui écrit : « La place privilégiée du français vient de ce qu’il a toujours offert au monde quelque chose de clarifié ».
Commençons par préciser les définitions qui permettront justement de clarifier le sujet.
- La francophonie, appelée monde francophone ou espace francophone représente l’ensemble des personnes et des institutions qui utilisent le français soit comme langue de l’initiale collectivisation, soit comme langue d’usage, langue administrative, ou bien langue d’enseignement ou enfin langue préférée..
Ainsi la francophonie renvoie à l’ensemble des pays francophones comme à l’ensemble des pays ou des régions membres de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF), notamment représentés par l’Association internationale des régions francophones (AIRF). Ces pays parlent majoritairement ou partiellement français mais le français n’est pas obligatoirement la langue officielle nationale ou régionale.
- la Francophonie, avec un F majuscule, désigne l’ensemble des gouvernements, des pays ou des instances officielles qui ont en commun l’usage du français dans leurs travaux ou leurs échanges sous l’appellation O.I.F. C’est l’Assemblée parlementaire de la Francophonie (APF) qui a préconisé la création d’une institution intergouvernementale francophone, souhait réalisé par la création, à l’occasion de la deuxième Conférence de Niamey en 1970, de l’Agence de coopération culturelle et technique, devenue aujourd’hui Organisation Internationale de la Francophonie dont l’APF est devenue une institution intégrée.
Le 20 mars est consacré Journée internationale de la francophonie. Chaque année un thème central est choisi par les instances internationales. Le thème de la célébration en 2012 était « Le français est une chance ».
En 2018 il était «Vivre ensemble dans la solidarité, le partage des valeurs humanistes et le respect de la diversité : source de paix et de prospérité pour l’espace francophone».
Louise Mushikiwabo vient d’être nommée secrétaire générale. Le thème de cette année n’est pas public à ce jour.
Il y a aussi la dictée de la francophonie organisée tous les ans à cette occasion pour les collèges
Organisation internationale de la francophonie (OIF) s’inscrit dans une solide tradition française d’interventionnisme linguistique. La coopération multilatérale francophone est mise en œuvre par cette organisation et quatre opérateurs directs spécialisés :
- l’Agence universitaire de la Francophonie (AUF) ;
- la chaîne de télévision internationale TV5Monde;
- l’Association internationale des maires francophones (AIMF) ;
- l’Université Senghor d’Alexandrie.
L’Organisation internationale de la Francophonie est une organisation internationale intergouvernementale fondée sur le partage d’une langue et de valeurs communes. Elle compte à ce jour 57 États membres de plein droit ou associés et 24 observateurs, et représente environ 300 millions de personnes
Le secrétaire général de la Francophonie est chargé de la mise en œuvre de la politique internationale ainsi que de l’animation et de la coordination de la politique de coopération. Il s’appuie sur un opérateur principal, quatre opérateurs directs et une assemblée consultative.
Tous les deux ans, un sommet rassemble les chefs d’État et de gouvernement des pays membres. Ce sommet définit les grandes orientations politiques de la Francophonie. Le coût de cette institution est d’environ 90 millions €/an avec une contribution française de près de 40 millions €/an.
- La francité est un néologisme apparu vers 1963, dans le même temps en France et au Canada. Léopold Senghor l’a employé le plus souvent pour exprimer la qualité de ce qui est français. J’explicite la francité en évoquant la figure de Léopold Sédar Senghor. C’est peut-être lui qui a le mieux évoqué cette universalité de la langue française. Senghor est un ancien président de la République du Sénégal, donc Africain, professeur de français à l’Université française, homme politique français puis au Sénégal, grand poète et grand chantre de la langue française qu’il a qualifiée de « langue des dieux». Senghor a œuvré pour la langue française comme moyen de transmission entre les cultures et entre les différentes langues. Il s’exprimait ainsi : « Le français ce sont les grandes orgues qui se prêtent à tous les timbres, à tous les effets, des douceurs les plus suaves aux fulgurances de l’orage. Il est, tour à tour ou en même temps, flûte, hautbois, trompette, tam-tam et même canon. »
Pourquoi aujourd’hui je vous parle à nouveau de la francophonie et de la francité, c’est que moi-même, je suis un exilé. Je fais partie de ceux nombreux qui ont choisi le français comme patrie et je pense que malheureusement aujourd’hui notre langue est en difficulté culturelle et économique même sur son territoire… mais ceci sera une autre intervention.
Diverses études ont montré que parler la même langue est un remarquable levier dans les échanges marchands (voir les E.U. et l’Angleterre), et en conséquence dans le développement économique.
Cependant la francophonie avec ses 300 millions de personnes concernées directement n’entre pas dans le classement des 10 premières institutions ou états dans les échanges économiques français avec ses 20% d’échange mondiaux annuel.
L’Europe est la première institution avec laquelle la France échange.
Les 10 premiers partenaires, qui concentrent les deux-tiers de nos échanges (67%), restent majoritairement des pays européens et développés mais comprennent désormais également un grand pays émergent, la Chine.
L’Allemagne conserve à la fois sa première position, son poids dans nos échanges, qui n’a que très peu diminué depuis 2012 (passage de 17,2% à 16,9% en 2016) et son écart avec nos autres partenaires.
Depuis 2012, les États-Unis sont passés du 5ème au 3ème rang.
La Belgique francophone est passée du 2ème au 5ème rang.
La Suisse francophone est au 9ème rang.
La Russie est passée du 10ème au 14ème rang : son poids dans nos échanges commerciaux a été divisé par deux sur la période 2012-2016 mais remonte actuellement.
Le reste des Etats européens et la Chine conservent des poids équivalents à ceux de 2012 dans nos échanges. Le commerce avec l’Italie, les Etats-Unis, l’Espagne, et la Belgique reste important, compris entre 7% et 8%.
Les échanges commerciaux français avec le monde sont déficitaires en 2018 de 62,2 milliards. C’est un fait commun depuis 2002. Le seul pays de l’OIF avec lequel notre balance est excédentaire est en 2018 la Belgique.
On peut donc conclure que « parler d’économie en francophonie, c’est lever un interdit, presque comme si l’on enfreignait une règle non écrite »[1]. La Francophonie est transformée en communauté des valeurs morales et des arts que toute activité de nature marchande ne saurait profaner. En effet il est indécent de parler d’autre chose que de culture.
Pour Convergence
Louis BACHOUD
Ingénieur Arts et Métiers, Ingénieur Mécanicien de la Marine, Architecte, Urbaniste, Louis BACHOUD a été professeur au Centre d’étude et de formation des assistants techniques du commerce (CCI), Chargé de cours à l’Université Robert Schumann à Strasbourg et professeur à l’Association Française d’Eclairage. Il est l’auteur de plusieurs ouvrages portant sur la culture et le développement économique aux éditions Valensin. Son dernier ouvrage paru aux éditions Valensin « l’Evangile selon Saint Finance ».
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[1] Kako Nubukpo, Économiste, ancien ministre de la Prospective et de l’Évaluation des politiques publiques du Togo et ancien directeur de la Francophonie économique et numérique au sein de l’OIF.