2 500 tonnes de déchets banals en provenance de Naples font route vers le port de Jorf Lasfar pour être utilisés par les cimentiers marocains comme combustible. Au Maroc, les réseaux sociaux et des associations écologistes se sont rassemblés derrière des slogans tels que « Le Maroc n’est pas une poubelle ! » et ont lancé une véritable polémique autour de la cargaison. Malgré une communication gouvernementale mal assurée, la ministre de l’Environnement défend que l’opération est conforme au droit marocain et international.
Hakima El Haité se justifiait le 5 juillet dernier : « La décision d’importer ces déchets italiens n’a pas encore été prise. Deux autres analyses capitales devraient être effectuées sur ces 2 500 tonnes de déchets de type RDF ». Les fameux déchets sont constitués majoritairement de plastique à priori non dangereux et de pneus et sont donc classifiés comme « non-dangereux » par l’Union Européenne et les législations nationales. Leur commerce est encadré pour répondre aux normes environnementales, or les 2 500 tonnes de déchets italiens ont fait l’objet d’une notification réglementaire et y sont donc a priori conformes.
Ces déchets devraient être utilisés en combustible de substitution à l’énergie fossile dans une cimenterie marocaine, en l’occurrence Lafarge Maroc. Ce n’est pas le seul cimentier à mener ce type de projet : tous les groupes présents dans le royaume travaillent sur l’intégration des RDF pour réduire leurs coûts et compenser leurs énormes besoins en énergie. Les fours à cimenterie permettent par leur température extrême de détruire les déchets mais aussi une grande partie des polluants, si les dispositifs de filtration adéquats sont prévus.
Le Desk note que la valorisation des déchets dans les cimenteries est une pratique largement répandue dans les pays développés. Le marché des déchets a d’ailleurs explosé en Union Européenne ces dernières années suite à l’adoption de nouvelles normes, mais principalement entre les pays membres.
Le problème n’est pas en soi l’utilisation des déchets comme combustible de substitution à l’énergie fossile (ce qui est recommandé par les organisations environnementales) ou leur importation (puisque des pays avancés se permettent de le faire) mais le fait que l’on justifie le recours à l’importation par l’absence d’une industrie nationale de tri et de recyclage. Al Huffington Post Maroc rappelle que le Maroc a justement investi plusieurs centaines de millions de dirhams depuis 2008 dans un vaste programme de gestion nationale des déchets.
Pourtant Hakima El Haité a admis que « le Maroc, qui cherche à développer une filière déchet exemplaire, ne dispose que d’une petite capacité de production d’environ 500 tonnes de déchets triés par jour ». La polémique actuelle rappelle aux autorités l’urgence de la mise en place d’un système de tri efficace, en plus du déploiement de décharges contrôlées pour démanteler les décharges sauvages, qui sont de véritables bombes écologiques.