Face à l’accroissement des besoins d’investissement dans les infrastructures en Afrique, il s’agit d’attirer plus de capitaux. Les techniques de financement structuré offrent des solutions innovantes et sont de nouvelles « pistes » pour accompagner les perspectives de croissance en Afrique.Trois règles d’or sont à maîtriser.
100 milliards de dollars, c’est à peu près le besoin annuel de financement des infrastructures du continent africain pour les dix prochaines années. Aujourd’hui, moins de la moitié de cette somme est disponible, d’où un déficit de financement de plus de 50 milliards de dollars à combler (Source Africa Infrastructure Country Diagnostic, AICD).
Malgré un accroissement important de l’intervention des investisseurs étrangers en Afrique au cours de la dernière décennie, qui représente désormais plus du double des aides publiques internationales, le continent dans sa globalité, et l’Afrique subsaharienne en particulier, ne disposent pas des ressources suffisantes.
Toujours selon cette même source, il est à noter que l’insuffisance des infrastructures en Afrique subsaharienne, que ce soit pour l’énergie et l’alimentation électrique, l’eau et l’assainissement, les routes, les réseaux de communication, etc. coûte aux pays concernés, environ deux points de croissance chaque année, et réduit leur productivité d’environ 40 %. Le manque d’infrastructures est accentué par les perspectives de croissance démographique de l’Afrique ; cette situation renforce la nécessité de répondre à des besoins immédiats importants tout en s’inscrivant dans un objectif à long terme.
Les pays de l’Afrique ont tous besoin d’infrastructures légères et lourdes, ainsi que d’un appui spécifique et ciblé aux États les plus fragiles de la région. Parce que les besoins en capitaux sont immenses, la mobilisation de financements innovants peut constituer un levier essentiel pour relever le défi des infrastructures en Afrique.
Les financements structurés
Les financements structurés ont été inventés pour apporter des capitaux aux acteurs économiques tout en réduisant les risques par l’utilisation de structures complexes (dette senior, equity, mezzanine, titrisation, instruments bancaires…) et de véhicules juridiques ad hoc. Ces derniers sont en général localisés dans des pays à faible imposition qui offrent certains avantages financiers et juridiques comme : protection de la vie privée, imposition faible, accès facile à des dépôts, et protection contre l’instabilité politique ou financière.
Ces financements particulièrement adaptés aux pays industrialisés se heurtent aux spécificités politique, économique, financière et coutumière de l’Afrique. A partir de ces techniques de financement et du savoir‐faire acquis dans la réalisation de montages juridico‐financiers complexes, il est encore possible d’aller plus loin dans la sophistication des outils pour mieux gérer les risques et adapter la rémunération du créancier.
Règle d’or N°1 : « Mieux gérer le risque et adapter la rémunération du créancier »
Pour attirer les capitaux privés sur ces programmes d’investissement, il faut déployer de nouvelles voies de circulation des capitaux entre un marché exigeant en termes de risque et de rendement, et des acteurs économiques publics et privés avec de réels besoins, mais souvent dans l’incapacité de répondre aux exigences des bailleurs de fonds internationaux.
Le concept de l’écluse financière et du financement rehaussé
Pour permettre aux capitaux de franchir cette dénivellation du niveau de risque et de rendement entre les bailleurs de fonds d’un côté, et les acteurs économiques de l’autre, il faut mettre en place ce que nous appelons des « écluses financières ».
La particularité de ce concept « d’écluses financières » n’est pas de baisser le niveau du haut pour le mettre à celui du bas, mais au contraire, de relever le niveau du bas à hauteur de celui du haut ; c’est une méthode efficace pour fluidifier la circulation des capitaux, la solution financière se situant dans le bas même de l’écluse
Règle d’or N°2 « Rehausser l’opération c’est améliorer les conditions du contrat »
La structuration financière développée permet ainsi de mieux gérer le risque, et de relier ce dernier à la rémunération du créancier. On parle alors de financement rehaussé. Celui‐ci facilite in fine l’apport de fonds aux acteurs économiques pour la réalisation de leurs projets.
Ces financements dits rehaussés s’adressent aussi bien aux grandes entreprises du secteur privé qu’aux acteurs du secteur public.
Ils s’articulent autour d’un principe simple. L’emprunteur n’ayant pas la capacité de répondre seul aux critères d’éligibilité des bailleurs de fonds internationaux, va recourir aux services d’un tiers de confiance, appelé ”société de projet (SPV)”. C’est cette dernière qui va emprunter sur le marché en lieu et place de l’emprunteur final et garantir l’opération vis‐à‐vis des créanciers.
La ”société de projet” va ensuite, par l’usage de techniques appropriées, et en impliquant l’emprunteur final, jouer le double rôle d’emprunteur/prêteur. Elle va gérer de manière dynamique le flux de trésorerie en transit. Elle aura ainsi rehaussé le financement et permis à chacune des deux parties, le prêteur et l’emprunteur final, de concrétiser l’opération.
Exemple d’un financement rehaussé
Programme de construction de l’Hôtel des Armées en RCA pour un budget de 150MEuros Dans le cadre d’un PPP avec l’État Centrafricain, une société de projet, ici NetOil, apporte une garantie bancaire de 150M€ sur une période limitée à 12 mois et reçoit en retour un financement LT de 100% de l’opération à un taux inférieur à 1%, et avec une franchise de 24 mois. |
C’est cette ”société de projet” qui lève la dette sur le marché pour compte propre, et la met ensuite à la disposition de l’emprunteur final. C’est elle qui gère les conditions du prêt avec les bailleurs de fonds, en termes de durée, de taux et de garantie.
Cette société va donc devoir assurer les conditions du rehaussement du prêt qu’elle va consentir à l’emprunteur final. Pour cela, elle va s’appuyer sur deux leviers : la mise à sa disposition par l’emprunteur final d’un actif bancarisé (une garantie financière, une avance bloquée de 15 à 20% du budget global, ou tout autre actif éligible), et un contrat de gestion spécifique sur la ligne de crédit obtenue. Elle va donc gérer les fonds disponibles avant de les verser à l’emprunteur final en fonction du protocole défini.
Cette gestion de court terme de la ligne de crédit s’effectue dans un cadre réglementaire strict. Les capitaux mis en jeu sont protégés et les rendements sont préétablis avec un seuil minimum. C’est ce seuil qui constitue la marge réelle du rehaussement.
La performance des opérations étant liée en grande partie aux conditions de marché, il est important de préciser que les engagements de la Société de projet sont intimement dépendants des marchés.
Règle d’or N°3 « S’affranchir des conditions de marché et des contraintes géopolitiques »
Pour gérer au mieux la fluctuation des marchés et les contraintes géopolitiques pouvant impacter à tout moment la performance de l’ingénierie financière développée, la société de projet intervient au sein d’un réseau d’opérateurs présents sur les places financières de différents continents.
Cela lui permet de valider, préalablement à la mise en place du protocole de rehaussement, la faisabilité de l’opération (notamment la gestion des garanties), et de prévoir la performance financière attendue, qui conditionne la marge de rehaussement (durée du prêt, période de franchise et taux).
La période de mise à disposition des fonds à l’emprunteur final peut constituer une variable d’ajustement en cas de tension sur les marchés.
Ces techniques de financements structurés qui font intervenir des montages juridiques et des structures financières complexes, permettent d’attirer de nouveaux capitaux disponibles sur ces programmes peu attractifs a priori, et qui, après le rehaussement, et les positionnent dans les conditions du marché.
Les financements rehaussés sont des outils particulièrement adaptés pour les pays de l’Afrique dans la mise en œuvre de leurs projets d’infrastructure
Pour Convergence
Jéhu NDOUMI
Ingénieur de conception et Économètre-Statisticien diplômé de 3ème cycle, Doctorant en Économie mathématique de l’Énergie. Il est actuellement Président de la holding internationale NetOil présent en Afrique, en France , Belgique et au Royaume-Uni.
Il est un spécialiste des montages structurés et des opérations financières complexes : investissement dans le non coté, Risk Management & Private Equity. Impliqué sur le continent Africain, il développe de nouvelles voies pour faciliter l’arrivée de capitaux sur les grands projets dans les secteurs de l’énergie, du transport, de l’environnement ou des communications électroniques.
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