Le secteur des RH est en plein bouleversement ! Les nouvelles techniques mais aussi les nouveaux entrants sur le marché du travail renversent les cadres de la profession. Le secteur RH va devoir intégrer la digitalisation comme source d’opportunités pour assurer son développement voire sa pérennité, de même que son modèle de recrutement va devoir être rapidement adapté aux attentes de la chaotique génération Z.
Prendre le tournant de la digitalisation
Pour les professionnels des RH, la digitalisation de leur profession est fortement susceptible d’avoir pour effet d’améliorer leur rôle au sein de l’entreprise. Pourtant celle-ci est encore loin d’être généralisée et les acteurs se montrent relativement réticents à l’engager. Telles sont les conclusions tirées par l’étude d’Unow « RH et transformation digitale » relayée par le Journal du net.
Deux freins principaux viennent entraver la digitalisation du secteur. Tout d’abord, les acteurs du secteur font preuve d’une certaine angoisse quant à la transformation de leur profession : 75% des interrogés reconnaissent méconnaitre encore largement toutes les propriétés du digital. Pour le directeur d’Unow, le second obstacle est organisationnel : « Les entreprises actuelles fonctionnent la plupart avec une hiérarchie pyramidale et une organisation en silo », or les entreprises innovantes d’aujourd’hui fonctionnent de manière éclatée et transversale.
Notons toutefois que les professionnels des RH sont très optimistes quant aux effets de la digitalisation à venir, perçue comme « une véritable opportunité, tant pour leur organisation que pour leur métier ». Les DRH sont bien conscients des enjeux qu’induisent le Big Data, les données comportementales ou encore les données issues des réseaux sociaux. De même, les nouveaux outils qui sont entrés en force dans l’organisation et le fonctionnement quotidien des entreprises doivent impérativement être saisis par les RH. On peut penser ici aux réseaux sociaux d’entreprise, aux vidéoconférences ou encore à la connexion à distance aux terminaux de recrutement. Aussi, l’automatisation des fonctions RH est un enjeu clé de l’évolution du secteur : il s’agit là d’informatiser les processus RH les plus administratifs pour permettre aux professionnels de déployer leur énergie et leurs ressources ailleurs.
Les moins de 20 ans vont bientôt semer le chaos dans les entreprises
Les premiers agents de la fameuse « génération Z », nés en 1995, arrivent sur le marché du travail, et ils représentent un enjeu de recrutement majeur pour les entreprises – qui vont devoir se montrer conciliantes. En France, ils sont quelques 16 millions et pour Eric Delcroix, conseiller en entreprise, ils vont dynamiter la hiérarchie pyramidale ! En effet, ils détestent les ordres : « ce sont des freelances nés ». Ce qui fonctionne avec eux, c’est le challenge permanent : il faut sans cesse les lancer sur de nouveaux objectifs, de nouvelles missions – et surtout profiter de leur capacité à travailler de manière autonome. Chez Google, on va plus loin dans l’émancipation de ces nouvelles recrues : un à deux jours par semaine, elles peuvent bénéficier des infrastructures et des relations de l’entreprise pour monter et développer leur propre projet. Le géant informatique se dote ainsi d’un véritable incubateur en interne, le meilleur moyen de fidéliser cette génération réputée sans attaches.
Les Z se caractérisent par une perspective internationale voire globale et c’est tout naturellement que plus des deux tiers envisagent de travailler à l’étranger d’après l’enquête « La Grande invazion » portée par BNP Paribas et The Boson Project. Du coup, les entreprises vont devoir prendre en compte l’attraction que représente un poste qui nécessite de voyager et les grands groupes vont devoir mettre l’accent dans leur communication sur les perspectives professionnelles à l’international.
Autre enjeu majeur de l’intégration de cette génération au monde du travail : l’adaptabilité des emplois du temps. Ces jeunes hyper connectés bousculent les frontières entre heures de travail et temps privé, ils se connectent depuis leurs smartphones pour suivre les évolutions de l’entreprise en temps réel. Eric Delcroix explique : « Nés avec le web 2.0, ils sont habitués à une grande réactivité et ne connaissent pas le formalisme des rapports hiérarchiques : s’adresser directement au patron de la société ne leur pose aucun problème ».
Pourquoi une telle réactivité ? Les Z ont besoin d’être constamment rassurés et encouragés, ils veulent du feedbacket avalent les critiques sans trop de difficultés. Pour Nicolas Sadirac, directeur général de l’Ecole 42, « ils ont un rapport décomplexé à l’erreur », contrairement à leurs aînés. Ils préfèrent reconnaitre leur manque de connaissance dans un domaine plutôt que d’être pris en flagrant délit d’incompétence.
Très sensibles à la transparence, les Z sont particulièrement attachés à l’e-réputation des entreprises qui leur permet d’évaluer ambiance et conditions de travail par le biais des voix des employés-mêmes. Le salaire n’est plus la principale motivation à l’embauche, il s’agit désormais de proposer un cadre de travail (et donc de vie) attractif, innovant, changeant et séduisant. Les entreprises qui adoptent des politiques RSE ont tout compris. Les Z attendent de l’entreprise qu’elle s’implique et s’engage pour le monde de demain, et cela en toute sincérité.
Recruter la génération Z
Les recruteurs actuels ont changé de perspective vis-à-vis de leur profession, et c’est tant mieux ! Professionnel des réseaux sociaux, le recruteur moderne est hyper connecté, multifonction, très accessible. Il est à la fois chasseur et ambassadeur et va chercher les candidats – qu’ils soient actifs ou passifs – là où ils se trouvent, c’est-à-dire sur Linkedin, Viadeo, Facebook ou Twitter. Tant mieux parce que les Z qui débarquent sur le marché de l’emploi n’ont aucune intention de déposer leur CV et lettres de candidature sur un Internet déshumanisé. D’après François Geuze, maitre de conférences en ressources humaines à l’université de Lille, les jeunes recherchent un « recrutement agile, mobile et digital » inclus dans des interactions humaines.
Ces « digital natives » accordent une importance considérable à leur réseau, devant leur diplôme ou même les compétences inscrites sur leur CV. A ce titre, considérer la cooptation comme moyen de recrutement n’est pas insensé. Mais cela va nécessiter un rapport complètement différent des entreprises au turnover : et si le départ d’un salarié n’était plus considéré comme un échec mais comme un moyen d’étendre le réseau de l’entreprise ?
Aujourd’hui, les entreprises sont encore en position ascendante et se contentent d’amasser un maximum de CV par des procédés véritablement industrialisés. Demain, elles devront abandonner ce modèle et devenir des acteurs proactifs du recrutement en cherchant à susciter l’intérêt des candidats. Dans les PME, qui ont déjà un fonctionnement transversal et à taille humaine, les difficultés induites par ce changement de paradigme devraient être surmontées assez facilement. Mais ce sera plus compliqué pour les grandes entreprises fondées sur une organisation en silo ou encore pour les sites de recrutement en ligne qui se contentent d’analyser les mots clé des CV et ne prennent pas encore en compte l’inversion du modèle en train d’opérer.
La génération Y qui avait pris de plein fouet l’explosion du chômage des cadres, la crise de 2008, la généralisation des CDD ou encore la rareté du CDI. Mais d’après Didier Pitelet, directeur de l’agence de communication Onthemoon, contrairement à leurs prédécesseurs, les Z « savent qu’ils risquent de connaître la crise et la précarité. Cette génération a acquis le fait qu’elle devra changer plusieurs fois de carrière dans sa vie. Pour eux, c’est un fait. La mobilité est désormais choisie et non plus subie ».
En cela, ils développent des solutions parallèles : la génération Z est plus entrepreneuriale et plus indépendante. D’après « La Grande invazion », ce ne sont pas moins de 47% des Z qui souhaitent créer leur propre entreprise ! Cette génération d’entrepreneurs a du mal à coller aux modèles actuels de l’entreprise. D’ailleurs, ces jeunes ne veulent pas choisir leur métier par raison mais par passion, préférant ainsi la liberté d’action au confort du salariat. A ce compte-là, demain ce ne sont pas des talents mais des compétences liées à un projet que les entreprises vont recruter !